C’est un meeting exceptionnel, pas seulement pour la qualité des machines en vol, et au sol mais surtout par le sentiment qu’il a laissé à tous, spectateurs, organisateurs, pilotes et mécaniciens. Quatre jours pendant lesquels des bénévoles qui travaillent toutes l’année à restaurer, entretenir, reconstruire leurs avions ont vu leurs efforts récompensés.
Et s’il fallait attendre jusqu’à deux heures avant d’arriver sur le plateau de Cerny, le jeu en valait la chandelle.

Comme toujours, le Bleriot XI, qui a débuté les démonstrations, nous a rappelé la fragilité des machines des débuts de l’aviation. Devant nous un assemblage de bois, de toile et un moteur centenaire qui résonne la passion de ses mécaniciens. 15 nœuds au sol et le voilà aux prises avec le vent, quelle fragilité, mais quelle grâce, quelle allure, l’homme aux commandes ne faisant que corriger les caprices d’une physique balbutiante. Le pilotage se transforme en danse, cette lutte devient une chorégraphie et l’histoire racontée est celle de l’homme impétueux. Merci monsieur l’aviateur, merci messieurs les avionneurs !

Pendant ce temps d’autres bruits, peut être plus mélodieux, se font entendre. Les « Merlin » Rolls-Royce qui équipent les avions tout aussi britanniques, Hawker Hurricane et Spitfire résonnent en défilant le long du taxiway.


Un ballet de trois planeurs prend le relai et nous rappelle la majesté du vol sans moteur avec simplement le son de l’air sur les ailes. Equipés de fumigènes, les formations de voltiges sont démesurées, quel contraste ! Les figures réalisées sont et en parfaite synchronisation pour ces rois de la physique. Seule la musique des haut-parleurs berce ce trio.

Le ballet des chasseurs et bombardiers se poursuit. Une attention toute particulière doit être portée sur peut-être le plus attendu, le plus gracieux, le plus beau des chasseurs américains, le P 51 Mustang. Un moteur Merlin dans le ventre il a l’allure d’un hippocampe. Ce renflement au ventre est harmonieusement balancé par sa bulle en verre qui vaut cockpit. Un fuselage acier, une décoration à damier rouge et jaune sur le capot moteur, ce chasseur de la deuxième guerre mondiale évoque la furtivité des forces américaines. Comme un poisson argenté il n’est visible que lorsque le soleil et le pilote s’accordent à nous renvoyer un écho lumineux. On le suit des yeux, une boucle puis une descente en piqué, son sifflement se fait entendre, cinq seconde d’une réalité saisissante, et cette réalité nous rattrape, c’est bien une arme que nous suivons des yeux.

Le meeting semble terminé, les premiers flots de familles repartent à l’assaut du parking mais venu de nulle part le Rafale de l’Armée de l’Air passe à basse altitude au dessus de la piste. Un deux trois, soleil ! Et la foule déjà éparse se fige, les yeux au ciel seule la tête semble bouger. Le dernier Golgoth se prépare à nous en mettre plein la vue et les oreilles. Le spectacle est complet.
Un virage au dessus de la foule, les deux tuyères rougies crachent les flammes de la postcombustion, le bruit est terrible, il ajoute au profil élégant et menaçant de ce chasseur. Ce n’est plus l’aviation qui nous hante alors, c’est la guerre. Si certains fanatiques cachés dans les montagnes afghanes sont décidés à faire plus de bruit que le Rafale, il a quelque chose de rassurant, de protecteur. Après quelques évolutions cet oiseau d’un autre âge se met en vol lent. Pendant quinze secondes il se met à parler. Le pilote essoufflé donne un peu d’humanité aux 15 tonnes de matériaux composites. Puis c’est un nouveau passage bas sur le dos en guise de salut.
120 avions au sol, 90 en évolution, quatre heures trente de spectacle et de soleil, entre les sandwiches la bière et les dédicaces. La manifestation se termine. 40000 enfants de tous les âges ont traversé un siècle d’aviation. Décidément le meeting de la Ferté Alais a inventé la machine à remonter le temps. Merci !